Ambapali – une reine sans couronne

Hommage à la femme indépendante, à la mère du Roi des médecines Jivaka et la none bouddhiste accomplie

Ambapali (ou Amrapali en sanscrit) était une femme de l’époque du Bouddha (VI siècle av. J. C.). Elle était renommée dans toute l’Inde pour ses qualités de danseuse. La célébrité de sa beauté faisait le tour du monde.

Certaines sources considèrent que c’est par désir pour elle que le Roi Bimbisara (Roi du Magadha) avait décidé d’envahir le village de Ambapali, Vahisali, en l’ayant vu danser une fois. Les deux eurent une relation d’amour très contrastée, condamnée à la cour royale. De cette relation amoureuse Ambapali eut un enfant, Jivaka, qui deviendra le fameux Roi des médecins (aussi appelé Shivago en Thaïlande).

La jalousie envers Ambapali à la cour du roi était telle qu’elle était exclue comme mère de l’enfant, et donc pour la mettre à l’écart les membres du palais rependirent le ragot que Shivago était orphelin et que le roi Bimbisara l’avait accueilli dans son palais.

A cause de cela, Ambapali décida de se retirer dans un champ de manguier que le roi lui donna pour pouvoir vivre avec son enfant.

En grandissant Shivago décida d’étudier la médecine et devint un docteur très réputé, médecin du roi Bimbisara et du Bouddha lui-même. C’est la raison pour laquelle parmi les masseurs et les masseuses de la tradition thaïlandaise, Shivago est considéré comme notre maitre et protecteur (pour en savoir plus voir l’école Nuad Sen).

C’est le Roi Bimbisara lui-même qui insista à fin pour que le Bouddha rencontre Jivaka et Ambapali : « J’ai un autre fils que j’aimerais vous présenter ainsi que sa mère qui n’est pas la reine Vidhei. Elle s’appelle Ambapali et lui, Jivaka. Il aura bientôt 16 ans. Ambapali vit à Vesali. Elle n’est attirée ni par la vie confinée du palais, ni par le titre ou le prestige. Elle n’aime que sa propre liberté ».

« Peu avant la fin de la retraite de la saison des pluies, arriva une femme d’une beauté exceptionnelle. Elle demanda à un jeune bhikkhu (moine) de la présenter au Bouddha […] Le Bouddha compris que la femme devait être Ambapali et le jeune homme, le fils du roi Bimbisara, Jivaka. Kaludayi (l’un des moines) n’avais jamais vu une femme aussi belle. Bhikkhu de fraîche date, il se demandait s’il était convenable de la regarder. Il préféra baisser le regard. Seuls le Bouddha et Sariputta (un des moines les plus fidèles à Bouddha) fixaient la jaune femme dans les yeux. […] Ambapali en se sentant regardée par le Bouddha avec tant d’amour et de bienveillance fondit en larmes, car aucun homme n’avait jamais lu son esprit et sa souffrance avec un seul regard ».

Suite à cette rencontre, elle prêta son champ de manguier au Bouddha afin qu’il puisse continuer ses méditations. C’est dans ce champ que Bouddha annonça le 47eme soutra (appelé donc Ambapalika sutta), sur les quatre établissements de la pleine conscience.

De plus la première communauté de nonnes bouddhistes recevra l’enseignement de la loi du Dharma dans ce même champ.

Ambapali deviendra même nonne et connaitra le nirvana (la libération). C’est elle l’autrice du poème ci-dessous sur l’impermanence de la beauté.

Par son parcours, de courtisane à nonne réalisée (arhat – qui s’est libéré des cycles des existences du Samsara), célèbre est la phrase suivante : « sans la boue, pas de lotus ».

Ambapali (ou Amrapali) signifie petite feuille de manguier. Nous ne connaissons pas ses origines. La légende dit qu’elle a été trouvée au pied d’un arbre de mangues.

En Inde elle est considérée comme une héroïne et plusieurs films ont été produits sur elle.

Références

Sur les traces de Siddharta, Thich Nhat Hanh
https://www.buddhistelibrary.org

http://www.canonpali.org

The Legend of Amrapali by Anurag Anand / Bollywood fil Ambapali 1966
Chinese Ekotarra Agama raconte la rencontre entre Ambapali et Bouddha.

D’après la traduction du Pâli à l’Anglais par Thanissaro Bhikkhu (bikkhu= moine)

Thig 13.1 therigatha (versets des anciens, c’est-à-dire des premiers disciples du Bouddha)

Poéme sur la Beauté écrit par Ambapali

Noirs étaient mes cheveux
— la couleur des abeilles —
et frisés aux extrémités;
avec l’âge, on aurait dit du chanvre grossier.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Odorante, comme un panier parfumé
rempli de fleurs:
Avec l’âge cela sentit le musc,
comme la fourrure d’un animal.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Epais et abondants, comme un bosquet bien tenu,
splendidement ordonnée, les extrémités travaillées
au peigne et à la broche.
Avec l’âge, ils se sont raréfiés
et ont disparu ici et là.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Ornés de délicates pinces en or,
ils étaient splendides, ornés de rubans.
Maintenant, avec l’âge,
cette tête est devenue chauve.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Recourbés, comme si un artiste les avait dessinés,
mes sourcils étaient jadis splendides.
Avec l’âge, ils retombent en plis.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Radieux, brillants comme des joyaux,
mes yeux:
Avec l’âge, ils n’ont plus rien de splendide.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Comme un pic délicat, mon nez
était splendide lors de ma jeunesse.
Avec l’âge, on dirait un piment.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Comme des bracelets — bien façonnés, bien finis —
mes oreilles étaient jadis splendides.
Avec l’âge, elles retombent en plis.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Comme des bourgeons de plantain dans leur couleur,
mes dents étaient jadis splendides.
Avec l’âge, elles sont cassées et jaunies.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Comme celle d’un coucou dans la dense jungle,
voletant à travers d’épais fourrés forestiers:
doux était le son de ma voix.
Avec l’âge, elle craque ici et là.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Doux — comme un coquillage bien poli —
mon cou était jadis splendide.
Avec l’âge, il est cassé et plié.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Like rounded door-bars — both of them —
my arms étaient jadis splendides.
Avec l’âge, they’re like dried up patali trees.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Ornées d’or et d’anneaux délicats,
mes mains étaient jadis splendides.
Avec l’âge, elles sont comme les oignons et les patates.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Gonflés, ronds, fermes et relevés,
mes deux seins étaient jadis splendides.
Dans la sécheresse de la vieillesse, ils pendouillent
comme de vieilles outres vides.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Comme une feuille d’or, bien brunie,
mon corps était splendide.
Le voici couvert de petites rides.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Douces dans leurs lignes, comme une trompe d’éléphant,
mes cuisses étaient jadis splendides.
Avec l’âge, elles ont l’air de bambous noueux.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Ornés d’or et de bracelets délicats,
mes mollets étaient jadis splendides.
Avec l’âge, on dirait des bâtons de sésame.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Comme s’ils avaient été fourrés de doux coton,
mes pieds étaient jadis splendides.
Avec l’âge, ils sont racornis et craquelés.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.

Tel est ce tas physique,
maintenant:
Une maison toute décrépie.
La vérité des paroles du Diseur de vérité
ne change pas.